MENAHEM BEGIN

Menahem Begin (1913 – 1992) est un homme d’État israélien. En 1935, il finit le droit à l’université de Varsovie. Le grand tournant de la vie de Begin fut sa rencontre avec Vladimir Jabotinsky, le fondateur du Sionisme révisionniste anti-socialiste et du mouvement de jeunesse Betar. En 1939, Menahem Begin s’enfuit à Vilnius, ville faisant alors partie de la Pologne jusqu’à l’invasion de ce pays par l’Allemagne nazie.

En 1940, il est arrêté par le NKVD et détenu à la prison Lukiškės à Vilnius. Accusé d’être un agent de l’impérialisme britannique, il est alors condamné à 8 ans de Goulag, puis transféré au camp de travail de Petchora en Sibérie. Libéré après la signature des accords Sikorski-Maïski en août 1941, il s’engage dans l’armée polonaise en Union soviétique. Évacué d’URSS avec le gros de cette armée, début 1943, il transite par l’Iran, l’Irak, puis la Palestine où s’organise le 2e Corps polonais. Caporal à la 5e division d’infanterie polonaise, il déserte en septembre 1943 comme 3 000 autres soldats juifs alors que leur unité stationnait en Palestine.

En 1943, Begin rejoint l’Irgoun et en prend le commandement en 1947. Begin vit dans la clandestinité. Il n’a de cesse de dénoncer les mesures prises contre l’immigration juive en Palestine et de lutter pour que le gouvernement britannique retire ses troupes et tienne la promesse que constituait la déclaration Balfour.
Dans les jours qui suivent la déclaration d’indépendance de l’État d’Israël du 14 mai 1948, Begin fait un discours diffusé par la radio pour appeler ses hommes à rendre les armes. Begin fonde son propre parti politique, le Hérout (« Liberté ») en 1948, à la droite de l’échiquier politique israélien.

Le Likoud gagna les élections de 1977. ll devient Premier ministre d’Israël de juin 1977 à octobre 1983. Begin négocie alors les accords de paix de Camp David avec le président égyptien Anouar el-Sadate, sous la médiation américaine du président Jimmy Carter. Il est alors convenu du retrait de Tsahal de la péninsule du Sinaï, restituée à l’Égypte. Ces accords, qui concrétisèrent le principe diplomatique d’échange « Territoires contre Paix », valent aux deux négociateurs le prix Nobel de la paix en 1978. Les négociations continuent jusqu’à la signature du traité de paix israélo-égyptien de 1979.

Transcription et traduction du discours prononcé le 25 février 1971 :

Mes frères et mes sœurs,

Nous vous saluons, nous vous admirons, nous sommes fiers de vous. Vous combattez pour la liberté, pour l’avenir du peuple juif, pour la patrie juive aimée. Mais nous devons poser la question cruciale : que s’est-il passé ?

Ne nous souvenons-nous pas de tous les grands révolutionnaires ? Pourquoi ? Ceux qui ont dû endurer la prison et parfois la mort au cours de la période tsariste : Zinoviev, Kaminev, Radek, Wassisselsky Boukharine. Ils ont été brisés en morceaux, humiliés, piétinés, implorant la pitié de cette créature monstrueuse et satanique appelée Joseph Vissarionovitch Staline, devant laquelle tous les puissants dirigeants soviétiques se sont humiliés de façon indescriptible.

Pourquoi ? Tous ces grands révolutionnaires sont devenus en trois ans inhumains dans l’humiliation et nos jeunes frères Slavina, Borodetskaya, Toukarevitch, Feigin, Switshansky, Deyank, la douce fille de Leningrad dont nous avons entendu parler avant-hier, tous à Leningrad, à Moscou, à Varkoutan… tous dans ces camps de concentration ont tenu tête à leurs bourreaux et ont dit « Oui nous sommes sionistes, nous sommes Juifs, et nous allons le rester. »

Pourquoi ? Mesdames et messieurs, l’ennemi russe se pose cette question. Quelque chose s’est passé en Russie. Bien sûr, il s’agit toujours une société fermée bien que plus ouverte qu’avant. Un combattant, un révolutionnaire est prêt à sacrifier sa vie pour son idéal. Il est toujours courageux, on ne le brisera jamais. Il est prêt à mourir. Mais il veut savoir que sa prise de position, ses paroles, son comportement influenceront d’autres personnes.

Pendant 30 ans, tous les prisonniers que Staline appelait « les ingénieurs de l’âme », quel barbarisme, ont été complètement isolés, ils ont disparu. Ils savaient que c’était futile car malgré tout ce qui était dit, rien ne serait jamais entendu par personne. L’aspiration du révolutionnaire n’est pas de faire son auto-publicité, non, au contraire. Il veut que son idéal gagne en force et c’est pourquoi il fait face à un tribunal militaire et dit « Je suis prêt pour la potence ». Quand il sait que rien ne sortira, son âme est brisée, et il peut même faire ce que Radek1 a fait. Mais cela n’arrive plus actuellement, en Russie soviétique. Il y a un grand changement révolutionnaire dans ce pays contre-révolutionnaire dirigé par une bureaucratie cruelle contre tous les droits de l’homme, qui persécute les innocents, transforme chaque mot en une expression fausse comme le double langage d’Eric Blair appelé George Orwell, l’ami d’un de nos orateurs.

Il y a en Russie, le samizdat2, des tracts, des livres. Mesdames et Messieurs, notre jeune génération, mal éduquée par le Komsomol3, qui ne savait rien sur le peuple juif, ni sur Eretz Israël, lit maintenant Herzl4, Jabotinsky5, Bialik6 en hébreu. Ils connaissent par cœur les chansons de Shlonsky7. Maintenant, ils reviennent vers nous. Ils apprennent et enseignent cette langue, la langue de David et de Yeshayahu8 que ces oppresseurs appellent la langue réactionnaire, parfois même la langue fasciste. Honte à eux. Et ils n’ont peur de rien, et ils savent tout ce qui se passe dans notre propre pays. Les sociétés soviétiques ne sont plus aussi fermées qu’elles l’étaient et maintenant nos frères, lorsqu’ils ont fait face au procès de Leningrad, savent que tout ce qu’ils disent sera connu dans tout le pays, cela atteindra des centaines de milliers de leurs frères en Russie, cela atteindra des millions et des millions d’hommes libres dans le monde entier. Donc une jeune fille condamnée à dix ans dans un tel camp de concentration dans lequel nous avons passé 2, 3, 17 ans, se lève et dit « Messieurs im eshkachech yerushalayim tishkach yemini« , Si je t’oublie Jérusalem, que ma main droite m’oublie9. Et le juge russe lui a dit : « Quelle langue parlez-vous ? Dans ce tribunal, vous devez parler russe. » Alors, la fille lui a traduit en russe : « Si je t’oublie Jérusalem, que ma main droite m’oublie. »

Mesdames et Messieurs, nos ancêtres ont dit im eshkachech yerushalayim sur les fleuves de Babylone. Admettons la vérité : il est plus difficile de dire im eshkachech yerushalayim, dans cette salle d’audience de Leningrad qu’il ne l’était pour nos ancêtres à Babylone de dire « que ma main droite m’abandonne si je t’oublie Ô Jérusalem ». Il s’agit d’un phénomène d’héroïsme spirituel qui élève l’humain. Cela vaut la peine de vivre à notre époque et de voir ce grand événement historique se dérouler sous nos yeux. Dans ces conditions, ils travaillent, ils se battent, ils résistent, ils vont en prison, ils sont prêts à mourir sur la potence pour faire face à leur combat et ils sont indomptables et incassables. Laissez-les apprendre, ces oppresseurs, laissez-les apprendre.

Il y a 30 ans, j’ai entendu de leur part, sur un ton péjoratif, le mot « talmudisme », avec un sous-entendu antisémite, « talmudisme » … Qu’ils apprennent un vrai grand mot hébreu, kiddoush hachem10. Et qu’ils sachent que lorsque le Juif est prêt au sacrifice de soi, il n’est peut-être pas encore victorieux, mais il devient invincible.

Mesdames et Messieurs, nous devons maintenant nous demander ce qu’il faut faire dans cette grande et historique campagne humaine et juive de libération. Déclarons tout d’abord notre objectif. Mesdames et Messieurs, il existe un journal soviétique en cyrillique appelé sovietische heimland qui paraît une ou deux fois par mois. Il y a des gens parmi nous qui voudraient que ce journal paraisse tous les jours. Ils écriront quotidiennement le yiddish en caractères cyrilliques qu’Avraham Avinou, Abraham le patriarche, était un marchand de bétail, que Moshe Rabbenou, le prophète Moise, n’a jamais existé, que l’Etat juif est un Etat fasciste, que l’armée juive est une armée nazie. Notre armée est l’armée la plus humaine jamais créée sur terre. Nous sommes satisfaits s’ils écrivent en yiddish sinat tzion, la haine de Sion.

Maintenant, déclarons notre objectif. Nous ne nous sommes pas rassemblés pour nous battre afin de développer le sovietische heimland11, la patrie soviétique, nous sommes réunis pour nous battre pour la patrie juive, pour tous les Juifs, y compris les Juifs russes. Maintenant, que devons-nous faire ? Monsieur le Président, tout d’abord, je suggère que cette Conférence ne se dissolve pas. Je suggère que cette Conférence, représentant le peuple juif dans le monde entier, décide de rester en session permanente. Elle peut se réunir d’ici six mois ou un an et nous verrons ce qui est sorti de notre décisions et de ce que les oppresseurs russes ont fait à nos frères. Et ils sauront. Ils ne sont pas insensibles à cette Conférence. Il se peut que les Russes l’imaginent plus importante qu’elle ne l’est.

Deuxièmement, je suggère, Monsieur le Président, que cette Conférence proclame entre erev pesach12 et erev yom haatzmaut13, un mois de lutte pour le judaïsme soviétique, comme une étape de notre combat. Ces deux grands jours, nous rappellent que nos ancêtres ont quitté le pays de l’oppression pour celui de la liberté et comment nous avons combattu, libéré et levé notre drapeau bleu et blanc aux yeux du monde entier pour voir que Judea non es victa, non es capta, Judea resurecta est14, la Judée n’est ni vaincue, ni captive, la Judée est ressuscitée. Au cours de ce mois, les Juifs du monde entier doivent se rassembler, de Buenos Aires à San Francisco, de Los Angeles à Londres, par centaines de milliers ils se rassembleront et manifesteront. Nous n’abandonnerons et n’oublierons jamais nos frères de Russie soviétique. Ils viendront à nous. Et pendant ce mois, nos jeunes devraient sortir et manifester devant les ambassades et consulats soviétiques, jour après jour, si nécessaire nuit après nuit, sans attaques physiques, un siège civique permanent devant les représentations diplomatiques soviétiques dans le monde entier.

Pendant un demi-siècle, les communistes ont fomenté des manifestations autour des ambassades américaines, autour des représentations britanniques, françaises, belges, néerlandaises, italiennes, en toute occasion, pour masquer le caractère réactionnaire de leur régime. Il faut que justice soit faite, même dans ce domaine. Maintenant, nous, les hommes libres, nous irons dans toutes les ambassades soviétiques, nous prendrons cette pancarte sur laquelle sera écrit ce qui est inscrit dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de décembre 1948 et sous les yeux de tous les ambassadeurs soviétiques, presque tous des officiers du KGB, nous dirons : « Voici votre engagement, tenez-le et laissez les Juifs quitter votre pays vers Eretz Israël, le pays d’Israël, vers leur ancienne patrie dans laquelle ils vivront en hommes libres, en Juifs libres et fiers ».

Mesdames et Messieurs, la semaine dernière, nous avons parlé de dramatisation et d’exagération. J’ai lu la biographie du docteur Goldmann15, le président du Congrès Juif mondial. Il y a un chapitre dans lequel il écrit qu’il admet que dans les années 40, lorsque des millions des nôtres étaient conduits vers une mort indescriptible pendant cinq horribles et longues années, le Dr Goldmann admet que les dirigeants juifs n’ont rien fait. Il admet al chet shechatanu16, pour les fautes que nous avons commises. Qu’avons-nous de ses regrets, de ses remords ?

Mesdames et Messieurs, il ne devrait plus arriver que des dirigeants juifs admettent n’avoir rien fait, il ne faut plus jamais dire al chet shechatanu bechasser mahasse, pour les fautes que nous avons commises car nous n’avons pas agi. Nous devrions plutôt pouvoir dire quand nous atteindrons un grand âge Avinu Malkenu Choneiou Vanénu ki yesh banu maassim17.

.Permettez-moi de vous dire, Mesdames et Messieurs, quelque chose de très sérieux. Je tiens d’une des sources les plus fiables de notre pays que lorsque le Docteur Goldmann a rencontré l’ambassadeur soviétique aux États-Unis, Monsieur Dobrynin18, Anatoly le Tsadik19 ils ont parlé du Moyen-Orient et des Juifs russes et Dobrynin a averti le Docteur Goldmann que si notre parole se répandait, y compris lors de cette Conférence, quelque chose de très néfaste pourrait arriver aux Juifs de la Russie soviétique. C’est un langage nazi ; c’est une tentative de transformer 3,5 millions de Juifs en otages. Nous ne prendrons pas part à cette menace. Mais ensuite, j’ai appris par une autorité fiable que le Docteur Goldmann a dit à Dobrynin : « Je vous suggère de demander à votre gouvernement de faire une déclaration selon laquelle, s’il y a un règlement au Moyen-Orient, le gouvernement russe laissera un nombre considérable de Juifs aller en Israël ».

Il est de mon devoir de révéler cette attitude mais aussi toutes les implications sur lesquelles je ne m’attarderai pas. Mesdames et Messieurs, il s’agit d’une campagne historique que nous avons des chances de gagner. Je crois de tout mon cœur que durant les années 1970, nous verrons des dizaines et des centaines de milliers de nos hommes, femmes et enfants de Russie venir dans notre ancien foyer. Mais il est à nouveau de mon devoir de dire quelque chose sur nos propres délibérations. Je suis venu ici le cœur plein. Quand j’ai entendu avant-hier, Feigin, Szwitchansky, héros de l’Union soviétique, héros du peuple juif, ces hommes merveilleux nés à Moscou après la Révolution, Mendel Gordin, un talmid Khakham, un savant, vraiment je me suis murmuré à moi-même Baroukh Shechiyanou, vékiyimanou, vèhygihanu lazmane aze20, Bénis sois-Tu de nous avoir permis de vivre, nous avoir soutenu pour vivre l’instant présent.

Cette Conférence doit non seulement proclamer l’unité juive mais aussi la représenter. Quand, mes amis, le peuple juif sera-t-il uni si ce n’est maintenant et si ce n’est sur nos grandes questions historiques, que ce soit en Israël ou en Russie soviétique. Resserrons nos rangs et ouvrons nos cœurs. Il est de mon devoir de dire que lorsqu’une déclaration est publiée, techniquement aussi en mon nom, par un porte-parole de cette Conférence, un porte-parole que je cite  » Nous rejetons et répudions totalement la philosophie et la pratique de la violence en tant que moyen d’action de la Ligue de Défense Juive21, la Ligue de Défense Juive est condamnée, etc. »

Lors de cette Conférence, mesdames et messieurs, est condamnée et sera condamnée à jamais la violence du cruel État bolchevique contre le peuple juif, le hooliganisme des hommes du KGB22, l’oppression et la répression exercées par tous les moyens tirés de l’Allemagne nazie, ou copiés sur celle-ci, contre ceux qui défendent la liberté et la dignité humaine. Cette violence, ce hooliganisme, cette cruauté sont condamnés et seront condamnés pour toujours, non seulement par le peuple juif, mais par tous les hommes libres. Je tiens à dire que je ne parle pas au nom de la délégation israélienne dont je fais partie, mais que je parle au nom d’hommes qui sont membres de la délégation israélienne, de la délégation des États-Unis, du Mexique, du Canada, de France, de Belgique, des Pays-Bas, d’Italie et, enfin et surtout, de l’Union soviétique. Et en leur nom, et au nom de centaines de milliers de Juifs d’Israël, et de la diaspora qui croient en ce en quoi mes amis et moi-même croyons, je dis et je déclare qu’à notre avis, aucune organisation juive, y compris explicitement la Ligue de Défense Juive, ne doit être condamnée par cette Conférence. Elle ne doit pas être condamnée.

Je tiens tout particulièrement, Monsieur le Président, à me dissocier totalement et sans aucune réserve de la phrase « rejette et répudie la philosophie et la pratique de la violence telles qu’elles sont pratiquées par la Ligue de Défense Juive ». Quel type de déclaration est-ce là ? Qui croit en une philosophie de la violence ? Seuls les nazis, les fascistes et les communistes croient en une philosophie de la violence. Les hommes qui luttent contre la violence détestent la violence, abhorrent la violence, rejettent la violence. Mais avec ces mots du porte-parole, nous dénonçons des Juifs à la police parce que nous avons désigné spécifiquement une organisation juive et devant le monde entier …

(quelqu’un lui parle et il lui répond)

Vous pouvez dire ce que vous voulez, je vais exprimer mon opinion. Ceci est une dénonciation …

(Brouhaha, applaudissements, on entend quelques bribes de phrases)

Je suis un homme libre …
Je voudrais dire, et personne n’interférera avec moi mes amis. Rabbin, Rabbin (il s’adresse au président de séance le Rabbin Schachter), s’il vous plaît.

Une femme dit : « Nous en avons parlé hier soir, nous en avons parlé hier soir … »

Madame, laissez-moi parler. Vous avez un chapeau sur la tête et moi j’ai (inaudible)

Ani a’daber. Ani noladti ben chorim. Ani a’daber, je parlerai, je suis né libre, je parlerai. Mesdames et messieurs, mes chers amis, baleboste, les responsables, mes chers amis que je respecte et admire, Rabbi Schachter a dit il y a deux nuits de cela que l’ère des Juifs du silence est révolue. Baroukh Hachem, Dieu merci. Maintenant, je voudrais seulement dire ceci. J’ajouterai, vénéré rabbin, que je crois, de tout mon cœur, que l’ère où les Juifs dénoncent les Juifs à la police est révolue pour toujours.

(Applaudissements et cris)

C’est toi le menteur si tu le dis …

(Brouhaha)

J’y viens … Mesdames et Messieurs, je souhaite clore mon intervention (applaudissements). Je ne comprends pas pourquoi j’ai été le seul orateur de cette tribune à avoir été autant dérangé (rires) alors que je parlais avec mon cœur, mais je ne me plains pas. Je ne me plains pas, je connais ceux qui m’ont précédé sur de telles plateformes, je ne me plains pas mais je vais terminer mes remarques en toute tranquillité, dans cette salle, en tant qu’homme libre parlant à des hommes libres.

(Un homme crie quelque chose, le président demande le silence et Begin semble répondre à cet homme)

Mon ami, cette remarque ne servira à rien, je voudrais vous dire que je ne sais pas où vous étiez dans les années 40 mais beaucoup ici savent où j’étais.

(Applaudissements et cris)

Mesdames et Messieurs, c’est une grande Conférence qui représente le peuple juif. Elle a connu quelques incidents amers et il n’y avait aucun moyen d’éluder la question, mais aujourd’hui, nous allons terminer nos délibérations et rentrer, chacun chez soi, et essayer d’aider notre peuple.

Les incidents, après avoir dit et écrit tout cela, seront oubliés. Je suggère que tous les incidents depuis hier, y compris ceux d’aujourd’hui, et y compris ce document que je ne veux plus décrire, soient effacés de notre mémoire puis nous nous disperserons en tentant de nous tenir tous ensemble malgré les différences d’opinions que nous avons, malgré l’incident, et ce autour d’une grande question historique : la libération de notre peuple en Russie soviétique et la sauvegarde d’Eretz Israël libéré en faveur de tout le peuple juif. Et nous croyons de tout notre cœur qu’ils viendront bientôt, en masse, au pays des braves, au pays des libres, en Eretz Israël, et alors nous pourrons tous à nouveau koulano u yachad, nechadesh, unekadesh, ulechashem leyney kol aolam et habrith hanitsrit hameshuleshet shel elohey israel, Am Israel vè Eretz Israel, tous ensemble, nous renouvellerons et consacrerons aux yeux du monde entier l’alliance éternelle de Dieu, du peuple juif et de la terre d’Israël.

1 Radek, 1885 –1939, est le pseudonyme que s’est donné Karol Sobelsohn, un révolutionnaire bolchevique, dirigeant du Komintern. Né dans une famille juive assimilée, le jeune Sobelsohn est un polyglotte imprégné de culture nationale polonaise qui milite très jeune à l’université de Cracovie, alors un centre actif de contestation des monarchies autoritaires. Il rejoint ainsi dès 1901, à 16 ans, le Parti social-démocrate du Royaume de Pologne et de Lituanie fondé quelques années plus tôt (1899) et dirigé par Rosa Luxemburg et Leo Jogiches. Il adopte à cette époque le pseudonyme de Radek, inspiré d’un personnage d’un livre que Stephan Zeromski a publié en 1898 en Pologne (Les Travaux de Sisyphe). Personnalité controversée, il fera partie du deuxième procès de Moscou qui s’ouvre le 23 janvier 1937. Après avoir réussi a échapper à la mort à plusieurs reprises, il sera condamné à dix ans de prison dans un pénitencier de l’Oural. En mai 1939, il disparaît, battu à mort par ses compagnons de cellule, jeunes délinquants alors nombreux dans les prisons soviétiques.

2 Le samizdat signifie autoédition en russe, était un système clandestin de circulation d’écrits dissidents en URSS et dans les pays du bloc de l’Est, manuscrits ou dactylographiés par les nombreux membres d’un réseau informel. L’existence du samizdat est liée au puissant système de censure présent en Union soviétique.

3 Komsomol est le nom de l’organisation de la jeunesse communiste du Parti communiste de l’Union soviétique, fondée en 1918 et disparue en 1991, après la dislocation de l’URSS.

4Theodore Herzl (1860 – 1904) est un journaliste et écrivain austro-hongrois. Il est surtout connu comme le fondateur du mouvement sioniste au congrès de Bâle en 1897 et l’auteur de Der Judenstaat (L’État des Juifs) en 1896.

5 Vladimir Ze’ev Jabotinsky (1880 – 1940) est le fondateur de la Légion juive durant la Première Guerre mondiale et un leader de l’aile droite du mouvements sionistes.

6 Haïm Nahman Bialik, 1873- 1934, est un des plus célèbres poètes, prosateurs, essayistes et journalistes de langue hébraïque.

7 Abraham Shlonsky (1900 – 1973) est un poète et éditeur israélien, présent à la Conférence mondiale pour la libération des Juifs d’URSS en 1971.

8 Yeshayahu, en français Isaïe ou Ésaïe, est un prophète de la Bible qui aurait vécu sous le règne d’Ézéchias puisqu’il est fait mention de « la quatorzième année du roi Ézéchias ». Isaïe est considéré comme l’un des quatre grands prophètes.

9 Psaume 137:5.

10 Littéralement la sanctification du nom de Dieu. Il a pris, au cours de l’histoire juive, une connotation particulière, celle du sacrifice de soi pour la sauvegarde de la judéité, voire de l’Etat d’Israël.

11 Jeu de mot avec le sens premier du journal sovietische heimland (NDT)

12 Le premier jour de la Pâque juive.

13 Le jour de la fête d’Indépendance d’Israël.

14 Vespasien, après sa victoire sur la Judée en 70 de notre ère, a frappé monnaie avec la mention Judea Capta.

15 Nahum Goldmann (1895 – 1982) est un homme politique et dirigeant sioniste natif de Vichnieva, en Biélorussie actuelle.

16 « Pour les fautes que nous avons commises. » Fait partie de l’office de Yom Kippour.

17 « Notre père, Note Roi, nous avons mal agi. » Prière juive devenue chant aux dix jours de pénitence.

18

19 Anatoly Fyodorovich Dobrynin (1919 – 2010) était un homme d’État, diplomate et homme politique soviétique. Il a été ambassadeur soviétique aux États-Unis pendant plus de deux décennies, de 1962 à 1986.
Le surnom Anatoly le Juste est ici ironique bien entendu (NDT).

20 Bénédiction que l’on dit lors d’une première fois, un enfant qui se met à marcher pour la première fois, un fruit que l’on n’avait pu goûter pendant un certain temps.

21 La Ligue de défense juive traduction de l’anglais « Jewish Defense League » a été fondée aux États-Unis par Meir Kahane en 1968 pour protéger les Juifs de l’antisémitisme. Le mouvement par ses actions violentes a été classé comme un groupe terroriste dans certains pays. Meir Kahane s’est présenté à la Conférence où il n’a pu entrer.

22 Le KGB, en russe Komitet gossoudarstvennoï bezopasnosti, c’est-à-dire le Comité pour la Sécurité de l’État, est le principal service de renseignements de l’URSS post-stalinienne, où il avait notamment la fonction de police politique.

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